Monaco (AFP) – Jean-Christophe Maillot, le directeur artistique des Ballets de Monte-Carlo, nous offre une version audacieuse de La Bayadère, s'éloignant volontairement des clichés exotiques. Sa démarche vise à éviter une répétition stérile de chorégraphies déjà vues des milliers de fois.
À la tête de la compagnie depuis plus de trois décennies, Maillot, aujourd'hui âgé de 65 ans, a toujours su allier créativité et technique classique. Il a déjà marqué son empreinte sur des œuvres telles que Roméo et Juliette et Cendrillon. Toutefois, La Bayadère, œuvre emblématique de Marius Petipa, l'a longtemps laissé sceptique, avouant que la musique de Léon Minkus lui semblait insuffisante sur le plan intellectuel.
En effet, ce ballet, créé en 1877 à Saint-Pétersbourg, raconte l'histoire dramatique de Solor, partagé entre Gamzatti, la fille du Rajah, et Nikiya, une jeune danseuse. Dans cette nouvelle version, intitulée Ma Bayadère, Maillot modernise l'intrigue en la situant dans un studio de danse épuré, transformant la barre en symbole de la créativité et de la discipline des danseurs.
Dans un décor minimaliste, le récit s'articule autour d'une troupe qui s'entraîne sous l'œil exigeant d'un chorégraphe, remplaçant le traditionnel Rajah. Les personnages de Solor et Gamzatti, interprétés par des danseurs de talent, sont animés par des dilemmes contemporains, comme la lutte pour la reconnaissance face aux nouvelles venues, représentées par Niki, prometteuse mais fragile.
Un moment poignant de l'œuvre est la chute tragique de Niki, rappelle une expérience personnelle de Maillot, qui a connu des défis similaires dans sa carrière. Cependant, l'essence du ballet demeure optimiste, culminant dans un rêve commun où la danse devient une source d'harmonie.
À travers cette réinterprétation, Maillot met également en lumière la diversité des danseurs au sein de sa compagnie, représentant plus de 20 nationalités. Selon ses mots, "mes danseurs, ce sont des Ferrari", soulignant ainsi leur technique exceptionnelle et leur potentiel.
Les scènes d'exotisme ne sont présentes que brièvement, lors d'une mise en abyme saisissante où le public voit simultanément les répétitions et les coulisses. Cela met en évidence la distance entre l'œuvre classique et les attentes contemporaines, un clin d'œil à une génération qui pourrait avoir du mal à se connecter à l'esthétique traditionnelle du ballet.
Maillot espère ainsi revigorer les classiques, permettant aux danseurs de s'engager dans une création véritable, loin du "karaoké chorégraphique". Cette vision modernisée pourrait établir un nouveau paradigme dans le monde de la danse et ouvrir la voie à une nouvelle appréciation parmi les jeunes publics.
Ce balancement entre tradition et innovation montre que l'art du ballet a encore beaucoup à offrir, et avec des artistes comme Jean-Christophe Maillot, son avenir semble prometteur.







