Que se passerait-il si chaque enfant placé bénéficiait de l'accompagnement d'un avocat dès son placement ? C'est la question qui sera au cœur des débats à l'Assemblée nationale ce jeudi. Une proposition de loi portée par la députée Ayda Hadizadeh vise à rendre obligatoire la présence d'un avocat pour chaque enfant placé sous assistance éducative, qu'il soit âgé de quelques jours ou d'adolescence. Selon Lyes Louffok, ancien enfant placé et cofondateur du Comité de vigilance des enfants placés, cette réforme pourrait profondément transformer la protection de l'enfance en France.
Dans un contexte déjà perturbé par la diffusion d'une vidéo montrant un enfant maltraité dans un foyer à Paris, cette proposition arrive à un moment crucial. La Défenseure des droits a également réagi, en annonçant l'ouverture d'une enquête judiciaire pour « violences volontaires sur mineur de quinze ans par personne ayant autorité ». Les voix s'élèvent sur ce sujet, et l'idée de garantir un avocat pour ces enfants est perçue comme un moyen d'assurer leur protection et leurs droits.
Des droits renforcés pour près de 380.000 jeunes
Avec environ 380.000 jeunes concernés, la loi stipule que chaque enfant suivi par une mesure judiciaire d'assistance éducative aura droit à un avocat, dont les frais seraient couverts par l'État. Isabelle Clanet, avocate spécialisée en droits des enfants, souligne l'importance de cette mesure : « Un avocat pourrait préparer l'enfant pour son audience, expliquer les enjeux et assurer la continuité dans son suivi juridique. »
Mais les implications de cette loi vont au-delà du simple accompagnement. L'avocat pourrait intervenir pour faire appel des décisions judiciaires, saisir les services sociaux sur des questions de placement et même aider à signaler des violences ou des maltraitances subies par l'enfant. Comme le rappelle Lyes Louffok, « Si j'avais eu un avocat à l'époque où je souffrais dans un foyer, j'aurais eu une meilleure chance d'être entendu et d'obtenir justice ». Cette vision évoque un changement significatif dans la dynamique de la justice pour les mineurs.
Vers une meilleure exécution des décisions judiciaires
Actuellement, le Syndicat de la magistrature a révélé que 3.350 décisions de placement n'avaient pas été exécutées en 2023, trop souvent à cause d'un manque de ressources. L'introduction d'un avocat pour chaque enfant pourrait non seulement renforcer la légalité des décisions judiciaires, mais aussi offrir un moyen de pression sur les services responsables de leur mise en œuvre. Arnaud de Saint-Remy, avocat au Conseil national des barreaux, estime que cette mesure pourrait renverser les rapports de force au sein de l'Aide sociale à l'enfance, facilitant ainsi l'accès à la justice pour ces jeunes vulnérables.
Des réticences subsistent cependant concernant la faisabilité de cette réforme, notamment en ce qui concerne son coût et son impact sur la rapidité des décisions judiciaires. Les Départements, qui ont actuellement la responsabilité de la protection de l'enfance, ont exprimé des préoccupations quant à ces enjeux. Malgré cela, l’idée que chaque enfant placé puisse avoir son avocat est accueillie avec optimisme par de nombreux acteurs du secteur, qui voient en cela une chance de redéfinir la protection des plus faibles dans la société française.







