Lors d'une récente intervention au marché de gros de Rungis, la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, a affirmé : "Si nous sommes réunis ici, c'est que la guerre agricole se prépare". Elle a lancé des "conférences de la souveraineté alimentaire" visant à mettre en place une stratégie nationale sur une décennie.
Genevard a insisté sur le fait que "la guerre agricole menace chaque jour un peu plus". Elle a souligné que les événements internationaux, comme la guerre en Ukraine et les politiques douanières des États-Unis et de la Chine, mettent en lumière la fragilité de notre système alimentaire. "L'illusion d'une prospérité durable a disparu", a-t-elle déclaré, appelant à un "grand réveil alimentaire".
Elle a mis en garde contre le fait que de nombreuses puissances anticipent une intensification de la guerre agricole, en réarmant leurs capacités. Pendant ce temps, selon Genevard, l'Europe fait face à des mouvements vers la décroissance. "Il est crucial que nous ne cédions pas à la tentation du déclin", a-t-elle dénoncé.
Depuis 2014, la politique agricole en Chine a bénéficié d'une augmentation de 40% du financement par habitant, tandis que les États-Unis ont connu une hausse de 86% et la Russie de 15%. En revanche, l'Union européenne a enregistré une baisse de 19%. "C'est une erreur historique qu'il faut rectifier", a-t-elle précisé.
Genevard a également évoqué le défi auquel la France sera confrontée si une crise majeure éclate : "Que les Français comprennent bien, en cas de conflit, ce sont nos agriculteurs qui devront assurer notre subsistance".
Alors que la balance commerciale agricole française pourrait passer dans le rouge en 2025, pour la première fois en près de cinquante ans, la ministre a exposé les "lames de fond" qui menacent le statut de la France comme première puissance agricole européenne. Parmi elles, l'érosion des capacités de production, surtout avec le départ prévisible d'un actif agricole sur deux à la retraite au cours des dix prochaines années.
Des préoccupations telles que la volatilité des prix, l'augmentation des charges, les effets du dérèglement climatique et les choix de consommation des Français sont également à prendre en compte. Genevard a noté une réduction dramatique de la part du budget des ménages consacrée à l'alimentation, passée de 35% en 1960 à moins de 20% aujourd'hui, plaidant pour un "patriotisme alimentaire".
Les experts estiment que sans une revitalisation de la politique agricole, la souveraineté alimentaire de la France risque de s'effondrer. Comme l'a déclaré un agronome de l'INRA, "il est impératif de rétablir une valorisation des produits locaux pour relancer notre agriculture". Cela ne peut se faire sans un soutien fort de l'Etat et une prise de conscience collective sur l'importance de nos agriculteurs.
